COMMENT FINANCER UNE INDUSTRIE

 DE LA DEFENSE EUROPEENNE ?

Les hauts responsables européens, qui se réunissent à Bruxelles le jeudi 21 mars 2024 lors d'un Conseil européen, vont discuter des moyens de financer l'industrie de la défense européenne afin de répondre aux besoins de l'Ukraine et de renforcer l'autonomie stratégique du continent. L'idée, selon le président du Conseil européen Charles Michel, est de mettre l'économie européenne "sur le pied de guerre".

Trouver 100 milliards d'euros

Les chefs d'État et de gouvernement se réunissant jeudi pour le premier jour de leur sommet sont unanimes sur le principe : des ressources supplémentaires doivent être allouées à l'industrie de la défense. Le Programme européen pour l'Industrie de la Défense (EDIP) est considéré comme un point de départ approprié dans cette optique. 

Cependant, le financement actuel de l'EDIP est estimé à seulement 1,5 milliard d'euros, ce qui est jugé insuffisant par certains. Selon le commissaire européen au Marché intérieur, Thierry Breton, ainsi que l'Estonie, l'Union européenne aurait besoin d'environ 100 milliards d'euros pour avoir un impact significatif. Le Premier ministre finlandais Petteri Orpo, connu pour son orthodoxie budgétaire, a souligné la nécessité de financer la défense pour renforcer l'industrie européenne et soutenir l'Ukraine.

Les discussions portent sur la recherche de nouvelles sources de financement en dehors du budget de l'UE, avec l'exploration de solutions innovantes, comme un emprunt européen sur les marchés financiers, l'incitation des grandes banques à financer la production de défense, ou encore l'utilisation des actifs russes gelés en Europe. L'implication accrue de la Banque européenne d'investissement (BEI) dans le secteur de la défense gagne également en popularité.

Quelles sources de financement ?

Actuellement, la Banque peut uniquement financer des équipements et produits à double usage — applicables autant dans le civil que le militaire — dont la majorité des revenus provient du secteur civil et non du secteur militaire. Et si 14 dirigeants ont demandé que la Banque aille au-delà de son mandat actuel, tous les États membres de l’UE ne partagent pas ce point de vue.La Banque européenne d’investissement pourrait étendre ses critères de prêt à la défense La BEI pourrait commencer à assouplir ses critères de prêt dès jeudi, si elle reçoit le feu vert final de la part des 27 États membres pour débloquer davantage d’investissements directs dans la défense.

Certains États membres envisagent d'utiliser les bénéfices des actifs russes gelés pour soutenir la défense ukrainienne, conformément au programme EDIP, et possiblement pour fournir une assistance militaire directe à l'Ukraine, comme le propose la Commission européenne.L'UE a bloqué au début de la guerre environ 210 milliards d'euros d'avoirs de la Banque centrale russe. Les intérêts de ces produits permettraient d'apporter une aide financière à l'Ukraine de 3 milliards d'euros par an.
L'idée d'émettre des eurobonds pour un financement commun rencontre des résistances, notamment de la part d'États membres prudents sur le plan budgétaire, tels que l'Allemagne, le Danemark, la Suède et d'autres. Ils soulignent les incertitudes juridiques et préfèrent exploiter les instruments financiers déjà existants, tels que la BEI ou le budget de l'UE.

Le Premier ministre finlandais s’est donc montré tout à fait prudent : « Nous devons trouver des moyens d’utiliser les instruments dont nous disposons déjà, comme la BEI ou le budget de l’UE », a déclaré M. Orpo, après avoir affirmé que « nous n’avons pas encore décidé de l’utilisation des euro-obligations ».

Les discussions sur le financement de la sécurité englobent non seulement la défense mais aussi d'autres aspects de la sécurité du continent, avec une volonté de renforcer la préparation et la réponse aux crises à l'échelle de l'UE.




Alize Marion pour DayNewsWorld