BORIS NADEJDINE CANDIDAT 

CONTRE VLADIMIR POUTINE AU KREMLIN

Ce mercredi 31 janvier 2024, Boris Nadejdine a officialisé sa candidature à la présidentielle russe contre Vladimir Poutine après avoir réuni, les 100 000 signatures nécessaires. Fermement opposé à la guerre en Ukraine, il risque la prison pour ses positions et sa place de candidat "Je me présente aux élections en tant qu’opposant de principe à la politique du président actuel".

Peu connu du grand public, ce vétéran de la vie politique russe, qui prône la "fin" de l'assaut en Ukraine et dénonce la dérive autoritaire de Vladimir Poutine, a suscité un engouement inattendu ces derniers jours, des dizaines de milliers de Russes se mobilisant pour soutenir sa candidature."Merci beaucoup à ceux qui ont cru en nous", a déclaré cet ex-député libéral face à la presse.

"Tout s'est bien passé", a-t-il souligné au sujet de la collecte des signatures de plus de 100 000 électeurs le soutenant, le seuil nécessaire pour voir sa candidature validée par les autorités.

Boris Nadejdine, opposant de Vladimir Poutine, a officiellement déposé sa candidature ce 31 janvier. Entre les 15 et 17 mars prochains, il tentera de prendre la place du chef d’État installé au Kremlin depuis 24 ans.

Un physicien devenu député

Né en 1963, Boris Nadejdine est physicien de formation et a commencé à s’intéresser aux problématiques de son pays à 17 ans, avant de se lancer dans la politique. Inconnu du grand public, le candidat est pourtant bien rodé. Il a commencé sa carrière au conseil municipal de Dolgoprudny, un oblast de la ville de Moscou, en 1990.

Après un premier échec pour être élu à la Douma - l’Assemblée fédérale russe - il devient conseiller du vice-Premier ministre Boris Nemtsov - assassiné en 2015 - avant de finalement obtenir un siège à la Douma en 1999. Il y intégrera le groupe Union des forces de droite.

Il s’est notamment fait connaître pour avoir défendu un projet de loi visant à rendre les revenus et biens des fonctionnaires accessibles au public ou pour la loi sur les élections et référendums, qui oblige chaque bureau de vote à publier ses résultats sur Internet.

Programme d'opposition

C’est par sa prise de position sur la guerre en Ukraine que s’illustre Boris Nadejdine. Fermement opposée à " l’opération militaire spéciale " lancée par Vladimir Poutine en février 2022, sa position détonne.

Le candidat a finalement obtenu les 100 000 signatures nécessaires pour se présenter officiellement face à Vladimir Poutine en faisant le tour du pays et en s’affichant régulièrement avec des soldats russes mutilés au front ou leurs familles endeuillées. Dans son manifeste de campagne, il s’engage à " ramener tout le monde à la maison ".

Au-delà de son discours anti-guerre, Boris Nadejdine veut se recentrer sur les problématiques internes du pays et promet l’amnistie aux prisonniers politiques. Le candidat voudrait par ailleurs instaurer un suffrage direct pour les représentants locaux . 

Il a critiqué le rapprochement sino-russe initié par Vladimir Poutine, tout en prônant un renforcement des liens avec l'Europe occidentale. Sur les sujets sociétaux, Boris Nadejdine a qualifié la loi anti-LGBT de "retour au Moyen-Âge", s'est prononcé pour un assouplissement des règles sur l'avortement.

Des prises de position qui lui ont valu le soutien d'opposants au président russe de premier plan. Le collectif de lutte contre la corruption fondé par Alexeï Navalny, le farouche détracteur du pouvoir russe actuellement en prison, lui est favorable. Mikhaïl Khodorkovski, le milliardaire anti-Poutine en exil, s'est aussi exprimé en sa faveur. Tout comme Ekaterina Dountsova, journaliste et opposante à Vladimir Poutine, qui vient de voir sa propre candidature à l'élection présidentielle retoquée pour "vice de forme" par la commission électorale.

Le Kremlin à la manœuvre ?

De quoi inquiéter Vladimir Poutine ? 

Pas forcément, et Dmitri Peskov, porte-parole du Kremlin, a déclaré mercredi 24 janvier : ce candidat "ne nous fait pas peur". Une partie des opposants au maître du Kremlin trouvent d'ailleurs le nouveau champion de leur cause trop parfait pour être honnête. Ils s'étonnent qu'il ait pu s'exprimer aussi librement pour critiquer Vladimir Poutine sans être inquiété. D’autres avant lui sont allés en prison pour de tels propos. 

Pourquoi est-il épargné ? 

Peut-être, que le chef du Kremlin " ne me considère pas comme une terrible menace ", admet l’opposant. Une hypothèse que Moscou ne manque pas de confirmer, arguant ne pas le " considérer comme un concurrent ".

Malgré ses soutiens prestigieux et ses prises de position, Boris Nadejdine a "trop de handicaps pour représenter un réel danger pour le régime", estime Jeff Hawn, spécialiste de la Russie à la London School of Economics. 

Ce politicien "incarne toutes les valeurs défendues par les hommes au pouvoir en Russie dans les années 1990, et il est l'héritier de cette génération largement discréditée aux yeux d'une majorité de la population russe", résume Jeff Hawn. Pour lui, c'est un candidat qui fera plaisir à l'intelligentsia des grandes villes et à la diaspora, mais le commun des Russes garde de très mauvais souvenirs des réformes économiques à marches forcées des années 1990.

A 60 ans, l'intéressé lui-même ne se fait toutefois guère d'illusions sur le résultat du scrutin présidentiel, tant la réélection de Vladimir Poutine, au pouvoir depuis 2000, semble évidente.

"Mais j'espère que le 17 mars marquera peut-être la fin, le début de la fin de l'époque Poutine", confiait-il dans un entretien il y a quelques jours.




Garett Skyport pour DayNewsWorld