RUSSIE LA CANDIDATURE DE BORIS NADEJDINE 

A LA PRESIDENTIELLE REJETEE

Boris Nadejdine, candidat antiguerre et opposant à Vladimir Poutine, a annoncé jeudi qu'il n' est pas autorisé par la commission électorale centrale (CEC) à être candidat à l'élection présidentielle de mars prochain en Russie et qu'il contesterait cette décision devant la justice  Il devait se prévaloir de la signature de 100.000 citoyens pour voir sa candidature validée, mais la Commission en a rejeté suffisamment, sur les 105.000 déposés, sous divers prétextes allant du formulaire mal rempli aux erreurs dans les adresses des signataires.

Selon Tass, l'agence de presse officielle du régime, la Commission électorale a rejeté près de 10.000 parrainages. Ainsi, elle considère "comme authentiques 95.587 signatures sur près de 105.000 en faveur du candidat du parti Initiative civile, Boris Nadejdine". "Ceci ne lui permet pas d'être enregistré comme candidat", précise encore Tass qui rappelle que la limite est de 5% de parrainages rejetés.

Un peu plus tôt, la Commission électorale centrale (CEC) avait déjà rejeté la candidature du chef des Communistes de Russie, Sergueï Malinkovitch, "en raison du pourcentage élevé de défauts dans les signatures des électeurs qu'il a recueillies pour son soutien". 

Peu d'analystes politiques croiront que ces décisions ont été prises sans instruction du Kremlin.

Né en 1963, Boris Nadejdine est physicien de formation et a commencé à s’intéresser aux problématiques de son pays à 17 ans, avant de se lancer dans la politique. Inconnu du grand public, le candidat est pourtant bien rodé. Il a commencé sa carrière au conseil municipal de Dolgoprudny, un oblast de la ville de Moscou, en 1990. Après un premier échec pour être élu à la Douma - l’Assemblée fédérale russe - il devient conseiller du vice-Premier ministre Boris Nemtsov - assassiné en 2015 - avant de finalement obtenir un siège à la Douma en 1999. Il y intégrera le groupe Union des forces de droite.

Programme d'opposition

C’est par sa prise de position sur la guerre en Ukraine que s’illustre Boris Nadejdine. Fermement opposée à " l’opération militaire spéciale " lancée par Vladimir Poutine en février 2022, sa position détonne.

Au-delà de son discours anti-guerre, Boris Nadejdine veut se recentrer sur les problématiques internes du pays et promet l’amnistie aux prisonniers politiques. Le candidat voudrait par ailleurs instaurer un suffrage direct pour les représentants locaux .

Il a critiqué le rapprochement sino-russe initié par Vladimir Poutine, tout en prônant un renforcement des liens avec l'Europe occidentale. Sur les sujets sociétaux, Boris Nadejdine a qualifié la loi anti-LGBT de "retour au Moyen-Âge", s'est prononcé pour un assouplissement des règles sur l'avortement.

Des prises de position qui lui ont valu le soutien d'opposants au président russe de premier plan. Le collectif de lutte contre la corruption fondé par Alexeï Navalny, le farouche détracteur du pouvoir russe actuellement en prison, lui est favorable. Mikhaïl Khodorkovski, le milliardaire anti-Poutine en exil, s'est aussi exprimé en sa faveur. Tout comme Ekaterina Dountsova, journaliste et opposante à Vladimir Poutine, qui vient de voir sa propre candidature à l'élection présidentielle retoquée pour "vice de forme" par la commission électorale.

Le Kremlin à la manœuvre ?

Dmitri Peskov, porte-parole du Kremlin, avait déclaré mercredi 24 janvier : ce candidat "ne nous fait pas peur". Une partie des opposants au maître du Kremlin trouvent d'ailleurs le nouveau champion de leur cause trop parfait pour être honnête s'étonnant qu'il ait pu s'exprimer aussi librement pour critiquer Vladimir Poutine sans être inquiété et jouant l' idiot utile du Kremlin. D’autres avant lui sont allés en prison pour de tels propos.

Pour le pouvoir laisser concourir Boris Nadejdine permettait de se prévaloir d'un jeu politique ouvert, même par temps de crise.Mais il pouvait craindre aussi que cet opposant ne se montre un peu convaincant dans sa critique du principe même de l'opération spéciale en Ukraine.

Suite à cette éviction, l'élection présidentielle du 7 mars  prochain s'annonce comme étant la plus étroitement contrôlée de l'histoire du pays depuis la chute de l'URSS.

Seuls 3 ou 4 candidats issus des partis d'opposition « accrédités » - le parti communiste et deux partis nationalistes - sont autorisés à concourir, ces partis critiquant le pouvoir de manière mesurée et ne s'opposant pas à l'opération militaire en cours .




Garett Skyport pour DayNewsWorld