POURQUOI LA FRANCE EST MOINS TOUCHEE PAR L'INFLATION QUE LES AUTRES PAYS EUROPEENS

Linflation est à son plus haut niveau au sein de la zone euro et de l’UE depuis plus de 20 ans. Elle a atteint près de 10% au sein de l’UE au mois de juillet. Un nouveau record depuis l'existence de la monnaie unique européenne.Les trois pays Baltes sont les Etats membres les plus grevés par l’inflation : l’Estonie a dépassé les 23%, la Lettonie et la Lituanie étant respectivement juste au-dessus et en dessous des 21%. 

Ce sont, pour le reste, principalement les pays de l’Est de l’Europe qui souffrent de la forte hausse des prix. Le reste de l'Europe n'est pas pour autant épargné. Ainsi aux Pays-Bas la hausse des prix dépasse 13 % sur un an. Le gouvernement néerlandais a pris moins de mesures que d'autres exécutifs européens pour soutenir le pouvoir d'achat des ménages et lutter contre l'inflation. Toujours selon les données d’Eurostat pour la même période, elle est de 8,8 % en Allemagne, de 10,3 % en Espagne, de 9 % en Italie. En Grande-Bretagne ce taux était de 10,1 % en juillet.

A l’autre bout du spectre, la France et Malte s’en tirent le mieux. Malte n’a notamment toujours pas relevé les prix de l’énergie réglementés par l’Etat, maintenant ainsi artificiellement l’inflation à zéro dans ce domaine...« Tout le monde devrait avoir autour de 9 % d’inflation normalement, mais la France fait exception », constate Éric Heyer, économiste et directeur du département analyse et prévisions de l’OFCE. Avec un taux d’inflation annuel de 6,7% au mois d’août , peut-on pour autant affirmer que la France se porte bien par rapport à ses voisins allemands, espagnols, italiens ou britanniques ?

Le bouclier tarifaire

Si l’inflation est plus faible en France, « c’est en partie grâce à notre mix énergétique », explique Éric Heyer. Continuer à miser sur le nucléaire nous permet notamment d’être plus indépendants que notre voisin allemand qui importe beaucoup plus d’énergies fossiles. D’après des chiffres de l’Agence internationale de l’Energie, le pétrole russe ne représentait que 17 % des importations d’or noir de la France en 2019, contre 34 % pour l’Allemagne.

L'autre raison et « la plus importante », selon Éric Heyer, ce sont « les mesures pour soutenir les ménages, soit avec des chèques soit en bloquant les prix ». L’Allemagne, la Grande-Bretagne et l’Espagne ont préféré, par choix politique, l’aide financière aux citoyens en distribuant des chèques et des remises sur le carburant, sans pour autant bloquer les prix. La France a préféré miser gros sur le bouclier tarifaire en bloquant les prix du gaz jusqu'à fin 2022 .. « S’il n’y avait pas cette protection, la facture d’électricité augmenterait en janvier 2023 de 120 euros par mois et la facture de gaz de 180 euros par mois ». 

Dans la lignée de propos tenus ce week-end par le ministre des Comptes publics Gabriel Attal, Bruno Le Maire a confirmé que tous les Français continueraient à bénéficier en 2023 d’une forme atténuée de « bouclier tarifaire » sur les prix du gaz et de l’électricité. La flambée des prix de l’énergie devrait donc être contenue et limitée au moins jusqu’au début de l’année 2023 pour les Français. 

Début 2023, « il y aura une augmentation pour tout le monde du prix du gaz et de l’électricité, qui sera la plus contenue possible, dans la mesure de ce que nous permettent nos finances publiques » , a garanti le ministre de l’Economie. Depuis l’automne 2021, le « bouclier tarifaire » et les remises gouvernementales sur le prix du carburant ont coûté 24 milliards d’euros, selon un récent chiffrage de Bercy mais le spectre des Gilets jaunes aidant...

Les limites du bouclier tarifaire

Et pourtant pour Jean-Marc Daniel, le bouclier tarifaire « est une modification artificielle des prix, qui, in fine sera juste un transfert pour les générations futures ». Ils permettent de limiter l’inflation « dans un temps limité » mais « la création de déficit budgétaire ne peut pas durer éternellement ». Et c’est une évidence pour tous les spécialistes, « l’inflation repartira à la hausse quand on lèvera ces boucliers tarifaires ».

Si l’État fait face à la crise avec les moyens du bord et réussit à limiter les effets de la baisse du pouvoir d’achat, c’est au prix d’une dette qui s’accumule et qu’il nous faudra bien absorber un jour ou l’autre.




Garett Skyport pour DayNewsWorld