POURQUOI DEVELOPPER DES SMR

 CES MINI-CENTRALES NUCLEAIRES EN FRANCE ?

La visite d'Emmanuel Macron à Belfort ce jeudi 10 février 2022 a permis de dévoiler un vaste plan de relance nucléaire qui acte un changement de cap à 180° de la politique initiée par le gouvernement précédent et longtemps poursuivie par l’actuel. Le chef de l'Etat a fait part de sa volonté de relancer l'énergie nucléaire en France, via la construction de nouveaux EPR et le lancement futur d'un prototype d'un SMR,, « small modular reactor » en anglais, petits réacteurs modulaires.

Aujourd’hui, il n’est plus question de respecter la loi de 2015 et de diminuer la part du nucléaire dans la production d’électricité, mais de l’augmenter. Plus question non plus de limiter la durée de vie des réacteurs à 50 ans, comme c’était encore le cas en juin 2020, quand le même Emmanuel Macron fermait Fessenheim.

Un moment propice pour le retour en grâce du nucléaire

Le nucléaire, qui compte aujourd'hui pour 70% de la production électrique française, s'annonce en effet comme un enjeu de la campagne présidentielle. Sur fond d'augmentation des prix de l'énergie, les candidats à l'élection ont fait de cette question un marqueur politique, qui divise la gauche et dont la droite s'empare. Le nucléaire permet non seulement de limiter la flambée des prix de l'énergie en France par rapport à ce que connaissent nos voisins, comme l'a rappelé le Premier ministre Jean Castex jeudi 30 septembre en présentant son « bouclier tarifaire » . Mais c'est également une énergie décarbonnée: «La France a une chance, quand on parle d'émissions de gaz à effet de serre, c'est le nucléaire», a déclaré Emmanuel Macron en marge d'un déplacement en Polynésie française fin juillet.

Le président a décidé « J’ai décidé », que tous les réacteurs qui pouvaient être prolongés devaient l’être. Avec cet objectif de construire en un peu moins de 30 ans six nouveaux réacteurs et d’en lancer huit autres, le chef de l’État sait qu’il va rallier tous les pragmatiques et notamment ceux de droite.

Et les mini-centrales nucléaires, les SMR pourraient devenir une solution.

Les SMR, de l’anglais « Small Modular Reactors »,  ​sont des petits réacteurs modulaires de nouvelle génération. Dans un premier temps, ils pourraient venir en complément des réacteurs à forte puissance dans les centrales classiques.

C'est pourquoi le président de la République devrait prochainement réaffirmer son soutien au développement en France de la technologie des petits réacteurs modulaires, ou small modular reactors (SMR) et les faire figurer dans la rallonge de 30 milliards d'euros au plan de relance. Emmanuel Macron avait déjà défendu l’option des SMR fin 2020 lors d’un déplacement à l’usine du Creusot (Saône-et-Loire) de Framatome et avait alors annoncé un financement de 50 millions d’euros du plan France Relance pour le projet Nuward piloté par EDF, visant à concevoir le SMR « le plus compact du marché », « doté de deux petits réacteurs modulaires ». Il avait poussé EDF à se trouver d’autres alliés. « Il nous faut rapidement rattraper le retard et considérer toutes les options de partenariats envisageables »​, avait insisté le Président de la République.

De nombreux avantages

Les SMR présentent de nombreux avantages par rapport à leur grands frères. Ils peuvent en effet être produits en usine et installés avec un minimum de génie civil et à coût réduit. Il ne faut que « quatre à cinq ans pour les construire »​, estime Xavier Ursat, le directeur du nouveau nucléaire chez EDF contre près de dix ans pour leurs grands frères.

Plus petits, les SMR ont certes une puissance moins importante, mais ils sont aussi moins gourmands en eau pour se refroidir. Ils disposent en outre de mécanismes de sûreté passifs, qui leur permettent de réaliser un refroidissement sans intervention humaine.

Alors que les centrales nucléaires se font vieillissantes et que les EPR sont longs et chers à construire, les SMR sont  perçus comme un bon moyen de décarboner l’électricité dans la transition énergétique. Une position défendue en avril 2021 devant les sénateurs par le président de l’Autorité de sûreté nucléaire. « Les SMR présentent, sur le papier, potentiellement des avancées très significatives en termes de sûreté. Dans un SMR, « le risque de fusion du cœur est exclu, et donc il n’y a pas de risques de rejet de produit radioactif à l’extérieur. ».

Cette technologie vise « à la simplification et la standardisation, pour faciliter la fabrication et offrir ainsi une solution supplémentaire dans la lutte contre le changement climatique, donnant de surcroît la possibilité de limiter les investissements associés à la modernisation des réseaux électriques existants et remplacer progressivement des centrales à énergie fossile, décrit la Société Française d’énergie Nucléaire (SFEN)​.

Le retard de la France

Mais sur cette technologie, qui concentre les espoirs des industriels, la concurrence internationale fait rage à travers le monde et la France accuse un certain retard...

De nombreux projets d'implantation de SMR sont en effet en gestation notamment en Russie, en Chine, aux États-Unis ou au Japon. Ainsi, la Chine a débuté en juillet dernier la construction de son premier SMR, Linglong One. Situé sur l'île de Hainan, ce réacteur de 125 mégawatts (MW) pourra alimenter 526.000 foyers en électricité. Parallèlement, en août dernier, le groupe russe du nucléaire Rosatom a obtenu les autorisations nécessaires pour implanter en Sibérie un SMR d'une puissance de 50 MW. Sa construction devrait débuter en 2024 et permettre d'exploiter des mines très reculées.

En Grande-Bretagne le Premier ministre britannique, Boris Johnson, a dés 2020 débloqué une enveloppe de 525 millions de livres pour développer plusieurs SMR, dont le projet de Rolls-Royce. Et il faudra attendre 2035-2040 pour que le SMR tricolore d'EDF soit mis sur le marché.

EDF et ses partenaires TechnicAtome, Naval Group, ainsi que le CEA espèrent pouvoir présenter un premier dossier d'option de sûreté à l'Autorité de sûreté nucléaire d'ici 2022...

La crise énergétique et son impact sur le pouvoir d’achat, les enjeux de souveraineté et de réindustrialisation mais aussi la volonté de décarboner l’économie ont changé la donne. Pour 30 ans au moins.




Jaimie Potts pour DayNewsWorld