POLEMIQUE AUTOUR DE LA 5G

LES ENJEUX ET LES DANGERS

En se moquant lundi14 septembre 2020 des partisans d’un moratoire sur la 5G comme des Amish adeptes de la lampe à huile, Emmanuel Macron a ravivé le débat autour de la nouvelle norme de communication qu'est la 5G, la 5e génération de téléphonie mobile.

Devant un parterre d’entrepreneurs du numérique de la French Tech réunis à l’Elysée, le chef de l’Etat a violemment répondu à la demande d’un moratoire sur le déploiement de la 5G, formulée dimanche dans le JDD par quelque 70 élus écologistes et de gauche, parmi lesquels le leader de la France insoumise Jean-Luc Mélenchon et l’eurodéputé EELV Yannick Jadot. Dimanche, ces élus de gauche et écologistes ont en effet demandé l'application d'un moratoire jusqu'à l'été 2021, dénonçant un déploiement de cette technologie « sans étude d'impact climatique et environnemental ni aucune consultation publique préalable ».

Mais quels sont les véritables enjeux derrière cette accélération des communications mobiles ?

Une question de souveraineté

« La France est le pays des Lumières, c’est le pays de l’innovation […] On va tordre le cou à toutes les fausses idées. Oui, la France va prendre le tournant de la 5G parce que c’est le tournant de l’innovation. J’entends beaucoup de voix qui s’élèvent pour nous expliquer qu’il faudrait relever la complexité des problèmes contemporains en revenant à la lampe à huile !

Je ne crois pas que le modèle Amish permette de régler les défis de l’écologie contemporaine », s’est moqué le chef de l’État, faisant allusion à cette communauté religieuse américaine hostile à la technologie et qui vit comme au XVIIIe siècle. Le Président a ensuite rajouté combien « sur la 5G et beaucoup d’autres sujets, on ne doit dépendre d’aucune puissance non européenne ».

Une question de souveraineté qui a pris de l’ampleur alors que le confinement et la crise sanitaire ont montré le poids écrasant des géants américains d’internet et que le leader d’équipements 5G est le chinois Huawei.

Un enjeu de compétitivité

La 5G va accompagner une multitude d’usages. « La 5G est la cinquième génération de réseaux mobiles, qui succède aux technologies 2G, 3G et 4G », explique l’Arcep, le gendarme des télécoms, qui a créé une section spéciale sur son site internet. La 5G est une technologie évolutive qui va s’enrichir progressivement, au gré de l’évolution des standards au niveau mondial.

À son lancement, la 5G va améliorer l’accès aux services proposés par les réseaux 4G en permettant un meilleur débit et plus de capacité. Avec la 5G, une quantité beaucoup plus importante de données peut en effet être échangée sans engorgement des réseaux. Elle évoluera ensuite au fur et à mesure que des éléments du réseau adopteront cette technologie et les fréquences sur lesquelles elle sera déployée. Elle favorisera ainsi le développement de services innovants pour les particuliers et pour les entreprises dans de nombreux domaines (santé, transports, etc).

L’internet des objets, tendance consistant à connecter et rendre intelligents un nombre croissant d’objets (automobile, capteurs divers, robots industriels, etc), pourra notamment bénéficier de la 5G et faciliter ainsi des applications multiples comme la ville intelligente, l’agriculture connectée, l’industrie 4.0, le véhicule autonome…La 5G constitue donc aussi un enjeu de compétitivité pour le pays, bien au-delà du secteur des télécoms.

Des effets néfastes sur la santé et l'environnement ?

Depuis l'arrivée du téléphone portable dans nos vies, la question de sa dangerosité et du caractère cancérogène des ondes émises par les antennes relais refait régulièrement surface.Un premier rapport scientifique sur les effets de la 5G sur la santé a été publié par l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) se veut rassurant. Intitulé « Déploiement de la 5G en France et dans le monde : aspects techniques et sanitaires », ce document de 190 pages- qui se veut sérieux- a souligné qu’il n’y avait pas « d’effets néfastes avérés à court terme en-dessous » des valeurs limites recommandées concernant l’exposition aux ondes électromagnétiques.

Concernant les effets sur la santé des ondes électromagnétiques, « il n’existe pas, selon le consensus des agences sanitaires nationales et internationales, d’effets néfastes avérés à court terme, en-dessous des valeurs limites d’exposition recommandées », écrivent les auteurs, qui s’appuient sur « un grand nombre » d’études publiées sur le sujet depuis 1950. « Les éventuels effets de long terme, cancérogènes ou non, difficiles à mettre en évidence, sont à ce stade, pour l’essentiel, non avérés selon les mêmes agences nationales et internationales », ajoutent-ils.

Un rapport réalisé par le Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD), l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et l'Inspection générale des finances (IGF), publié ce mardi, minimise toutefois les risques pour la santé. L’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses), qui avait relevé en janvier le manque de données scientifiques sur le sujet, doit rendre son rapport final en mars 2021.

Et les risques pour l'environnement ?

Au-delà des éventuels effets néfastes en termes de santé publique, les opposants à la 5G lui reprochent de provoquer à terme une hausse des émissions de gaz à effet de serre.

La Convention citoyenne pour le climat - assemblée de citoyens tirés au sort, créée sur proposition d'Emmanuel Macron en réponse au mouvement des gilets jaunes dont les 149 propositions avaient été présentées au président de la République en juin dernier, avait préconisé un moratoire sur le déploiement de cette technologie. Le président de la République avait d'ailleurs validé, au même titre que 145 autres, la proposition de moratoire sur la 5G de la Convention climat.

Le rapport final de cette Convention appelait à « Sortir de « l’innovation pour l’innovation », soulignait l’impact écologique et carbone. Par exemple, le passage de la 4G vers la 5G générerait plus de 30 % de consommation d’énergie carbonée en plus, sans réelle utilité (pas de plus-value pour notre bien-être)."

Alors que la France ouvre fin septembre ses enchères aux opérateurs pour qu’ils acquièrent les fréquences nécessaires à cette nouvelle norme, la volonté de l’Etat d’aller jusqu’au bout du déploiement de la 5G s'est affichée sans fard.




Joanne Courbet pour DayNewsWorld