LE 100% ELECTRIQUE CREE

UN RISQUE SOCIAL VIOLENT SELON

LE PATRON DE STELLANTIS C. TAVARES

Alors que la Commission européenne a signé l'interdiction de vendre des voitures à essence et diesel à partir de 2035, le directeur général de Stellantis estime que la transition vers le tout électrique « crée un risque social ».

« Ne pas regarder l'ensemble du cycle de vie des voitures électriques est évidemment très restrictif », déclare le dirigeant Carlos Tavares aux quotidiens français Les Echos, allemand Handelsblatt, italien Corriere della Sera et espagnol El Mundo , publiés le mardi 18 janvier. .

« Avec le mix énergétique européen, un véhicule électrique doit rouler 70 000 km pour compenser la mauvaise empreinte carbone de fabrication de la batterie et commencer à creuser l'écart avec un véhicule hybride léger », assure-t-il.

C’est peu commun d’entendre ce type d’alerte dans la bouche d’un grand dirigeant d’entreprise.

Carlos Tavares en faveur des véhicules hybrides

« Nous savons aussi qu'un véhicule hybride léger coûte moitié moins qu'un véhicule électrique », observe Carlos Tavares dont le groupe Stellantis va s'approvisionner en lithium allemand. « Il ne faut pas perdre de vue non plus que nous risquons (...) de perdre les classes moyennes qui ne pourront plus acheter de voiture et qu'il y aura des conséquences sociales », a-t-il souligné.

Et le directeur général de Stellantis de poursuivre avec une certaine ironie, plaidant une nouvelle fois pour le maintien des véhicules hybrides : « il est donc trop tôt pour dire si l'approche européenne est raisonnable ».

« Au total, vaut-il mieux accepter de faire rouler des voitures hybrides thermiques très performantes pour qu'elles restent abordables et apportent un bénéfice carbone immédiat, ou faut-il des véhicules 100 % électriques que les classes moyennes ne pourront pas se payer, tout en demandant aux États de continuer à creuser le déficit budgétaire pour les subventionner ? C'est un débat de société que je rêverais d'avoir, mais pour l'instant je ne le vois pas. »

Le patron du groupe qui possède les marques Peugeot, Citroën, Fiat, Jeep ou encore Opel, pointe l’objectif de la Commission européenne :

2035, la fin de la vente de véhicules thermiques.

« Nous respectons évidemment les lois », dit-il, « mais ce qui est clair est que l’électrification est la technologie choisie par les politiques, pas par l’industrie », résume-t-il.

« Les conséquences sociales seront majeures »

Pour les constructeurs, il s'agit « de limiter au maximum les 50% de surcoût de l'électrique, en cinq ans », avec des gains de productivité importants.

« Nous verrons dans quelques années les constructeurs qui auront survécu et les autres », prédit le patron de Stellantis.

« Sans transition progressive, les conséquences sociales seront majeures », craint-il. 

« Nous avons tout un écosystème de sous-traitants autour de nous. Il va falloir qu'ils bougent aussi rapidement que nous. »

« C'est la brutalité du changement qui crée le risque social», souligne Carlos Tavares.

La voiture électrique pourrait entraîner la perte nette de 275.000 emplois en Europe

Pour Carlos Tavares, « il y avait des méthodes moins chères et plus rapides pour réduire les émissions que celle-là ». Une voiture électrique doit « rouler 70 000 km pour compenser la mauvaise empreinte carbone de fabrication de la batterie et commencer à creuser l’écart avec un véhicule hybride léger », qui lui, coûte moitié moins.

Et puis encore faut-il que l’électricité dont on recharge la voiture électrique viennent d’une source propre, et non pas de centrales à charbon ou à gaz. Carlos Tavares pointe aussi le côté beaucoup trop rapide de la transition, pour l’industrie, pour tous ses sous-traitants.

 En résumé, il pose la question :

« faut-il des véhicules 100% électriques que les classes moyennes ne pourront pas se payer, tout en demandant aux Etats de continuer à creuser le déficit budgétaire pour les subventionner ?

 C’est un débat de société que je rêverais d’avoir, mais pour l’instant je ne le vois pas ».

Plus durable coûte généralement plus cher à produire

Cette interview arrive dans un contexte où les ventes de voitures en Europe, contrairement à ce qu’on voit en Asie et aux Etats-Unis, ne redémarrent pas. De 13 millions de voitures vendues en 2019, on est passé à 9,9 millions en 2020, et cela a encore baissé en 2021, 9,7 millions.

Au-delà de la crise des semi-conducteurs, les analystes estiment que l’arrêt des ventes de voitures thermiques en Europe et donc la nécessité de passer à l’électrique, une technologie plus chère, c’est cela qui pèse déjà sur les ventes, à 13 ans de l’échéance de 2035.

Ce qui est vrai pour la voiture l’est aussi plus largement pour la transition écologique.

C’est le cas dans la production d’énergie : Thierry Breton parle de 50 milliards d’euros pour moderniser les centrales nucléaires actuelles, plus 500 milliards d’euros d’ici 2050 pour construire les nouvelles centrales nucléaires en Europe.

Idem dans le logement, la rénovation coûte cher, et l’amortissement se fait sur une période longue.




Emily Jackson pour DayNewsWorld