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COMMENT LE PEN ET MACRON SE PREPARENT

AU DEBAT D'ENTRE-DEUX-TOURS

La même affiche, mais pas de remake. Le second tour entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen, dimanche prochain, se déroule sous des auspices bien différents. D’abord parce que le rapport des forces se révèle infiniment plus serré qu’en 2017. Certes, le Président compte aujourd’hui, dans les enquêtes d’opinion, une avance qui s’est précisée tout au long de la semaine . Mais cet écart, bien qu’au-dessus de la marge d’erreur, n’est plus suffisant pour lui assurer une réélection sans coup férir.

Cinq ans après le débat spectaculaire du printemps 2017, le président-candidat et la cheffe de file du Rassemblement national fourbissent à nouveau leurs armes. Le débat retour entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen, mercredi à 21 heures sur TF1 et France 2, n’offrira pas la même physionomie qu’en 2017. À l’époque, la différence de niveau entre les deux finalistes était abyssale.

En cinq ans, l’écart entre les deux finalistes s’est considérablement réduit. La confrontation entre un candidat issu de l’arc républicain et une candidate d’extrême droite se rapproche désormais des scores des traditionnelles oppositions entre droite et gauche, au second tour, sous la Ve République.

Abandonnant la traditionnelle posture de dénonciation morale de l’extrême droite, Macron a assuré cette semaine vouloir livrer un combat « projet contre projet ». Il s’agit, en réalité, d’un autre type de confrontation : rejet contre rejet. Surfant sur les plus hostiles au sortant, dans le sillage des Gilets jaunes et des antivax, et en appelant à tous les déçus du macronisme, Le Pen tente d’organiser un référendum anti-Macron. Jeudi à Avignon (Vaucluse), elle a retourné au chef de l’État le compliment du « barrage », appelant à en ériger un contre sa réélection.

Quant au traditionnel « barrage » contre l’extrême droite, il a du plomb dans l’aile. Certes, hormis Éric Zemmour et Nicolas Dupont-Aignan, presque tous les candidats battus au premier tour ont appelé, au minimum, à ne pas voter pour elle.


Ironie de l’histoire : pour les deux finalistes, la principale réserve de voix se situe chez ceux qui ont opté pour Jean-Luc Mélenchon au premier tour. Alors même que, à leurs yeux, Macron et Le Pen constituent deux repoussoirs… Quelle proportion des 21,95 % de l’Insoumis se reportera sur le Président ?

Pour la première fois, une présidentielle se jouera non sur une adhésion minimale, mais sur un refus.


Sur le fond côté Macron: économie, diplomatie, avec bien sûr les relations entre Marine Le Pen et Vladimir Poutine, état de droit. La dénonciation morale de l’extrême droite ne semble pas à l’ordre du jour. Le Macron nouveau serait celui de l’association, de la concertation, du temps long. C’est du moins ce que promet le candidat de La République en marche s’il est réélu dimanche prochain. Remisé, le président pas encore quadragénaire qui, dès les premiers mois de son mandat, bouleversait le code du travail par ordonnances, supplantait l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) par celui sur la fortune immobilière (IFI), ouvrait la SNCF à la concurrence, le tout au pas de charge. « Conférence des parties prenantes » et « convention transpartisane » peuplent désormais le programme 2022 d’Emmanuel Macron. « J’écoute », « j’entends », répète-t-il en référence à ses déplacements de campagne, cherchant à incarner « cet “avec vous” [qui] est une nouvelle manière de faire », assurait-il encore mercredi sur TF1.  En défense, l’équipe du sortant s’attend à des tirs en rafale contre le « président de l’argent », sur l’« appauvrissement » des Français ou encore sur « la France d’en bas contre celle d’en haut ». D’où un impératif : se montrer empathique.

Dans le camp adverse, Marine Le Pen, mettra en scène sa sérénité . Sur le fond, Le Pen espère ouvrir une brèche sur le sujet de la réforme des retraites, afin de séduire l’électorat de Jean-Luc Mélenchon.La candidate RN « veut faire un gouvernement d’union nationale », dit-elle. Elle est censée montrer que Marine Le Pen est capable de « dépasser » son propre camp et de créer « l’ouverture », comme l’avait fait Nicolas Sarkozy en 2007, lorsqu’il avait fait venir Bernard Kouchner ou Frédéric Mitterrand dans le gouvernement de François Fillon. Marine Le Pen présidente suivra à la lettre la Constitution de la Ve République. Elle nommera dans un premier temps un Premier ministre, qui pourra d’ailleurs changer après les législatives. Charge à lui de présenter un gouvernement, que le Président approuve ou pas. »

Dès l’été, la candidate prévoit de faire voter deux collectifs budgétaires pour supprimer la redevance télé, pour instaurer une part fiscale pleine dès le deuxième enfant, pour rétablir la demipart fiscale pour les veuves et les veufs, et pour créer un impôt sur la fortune financière (IFF) dans le but de remplacer l’impôt sur la fortune immobilière (IFI). L’exonération de l’impôt sur le revenu pour les moins de trente ans et la possibilité pour les entreprises d’augmenter de 10 % les salaires jusqu’à trois fois le smic sans augmentation des charges patronales passeront par un référendum. Son  équipe de campagne sait que l’entre-deux tours ne tourne plus autour de la question du pouvoir d’achat, du prix de l’essence et de la retraite à 65 ans, mais plutôt autour d’une autre : comment entend-elle gouverner, si elle est élue ?

« Je vais diriger le pays en mère de famille », a-t-elle dit en marge d’un déplacement en Eure et Loir, comme l’a rapporté Le Figaro.




Joanne Courbet pour DayNewsWorld