LA CONSOMMATION D'ANTIDEPRESSEURS 

EXPLOSE CHEZ LES JEUNES

Le rapport du Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA), publié lundi 13 mars, fait part d’une explosion de la consommation de psychotropes chez les jeunes. Entre 2010 et 2021, la consommation des antidépresseurs a augmenté de 179 %, quand elle a fait un bond de 148 % pour les psychostimulants, de 114 % pour les antipsychotiques et enfin de 35 % pour les hypnotiques et anxiolytiques.

Le constat est alarmant.

Le phénomène concerne des dizaines de milliers d'enfants. Le niveau de prescription de psychotropes concerne un enfant sur vingt, précise le HCFEA.

Des chiffres alarmants qui peuvent s’expliquer à l’aune d’autres études ; l’une faisait récemment état de 62 % des 18-24 ans qui auraient des pensées suicidaires. Un jeune (dès l’âge de 12 ans) sur quatre se dirait malheureux.

Les prescriptions de psychotropes se font souvent hors autorisation de mise sur le marché (AMM), alerte le HCFEA, les médicaments appropriés n’existant pas pour les enfants. Selon le rapport, c'est le cas pour 40% des prescriptions en ville, et entre 67 et 94% de celles délivrées à l’hôpital.

Des responsabilités multiples

Le Covid et les confinements successifs ont eu un effet délétère sur la santé des enfants, selon le rapport. Les gestes suicidaires ou encore les sentiments d'angoisse sont également en hausse.

Ce fléau de l’usage des médicaments qui frappe la jeunesse en France a déjà largement touché les États-Unis avec le Ritaline. À cette question de l’usage et de la prescription abusive des médicaments s’ajoutent l’environnement « hyper-numérisé » et l’enfermement de l’esprit derrière des smartphones et des écrans. L’afflux permanent d’informations avec leurs doses d’angoisses (identitaires, climatiques…) est une prise d’assaut des cerveaux. C’était également sans compter sur les addictions numériques, à la pornographie notamment. Le rôle des parents, tantôt démissionnaires, tantôt déboussolés, peut aussi expliquer cette tendance comme celui de l’école, de moins en moins sanctuarisée.

La santé mentale est donc une problématique de santé publique de première importance chez l’enfant, en France comme dans les pays occidentaux. Lorsqu’ils surviennent précocement, les troubles mentaux et la souffrance psychique impactent toute une vie.

La baisse de l'offre de soin en cause

Or "l’offre pédiatrique, pédopsychiatrique et médicosociale est en recul et ne permet plus d’accueillir dans des délais raisonnables les enfants et les familles", note le HCFEA. Faute de spécialistes, la majorité des consultations de l’enfant est réalisée par le médecin généraliste. "Seuls 30% des enfants sont reçus par un pédiatre, qui concentre sa patientèle sur les moins de deux ans."

Le mal-être des enfants et adolescents est donc accentué par un déficit de l'offre de soin, note le rapport qui pointe un manque de spécialistes et une médecine scolaire dont la situation se détériore.

Les consultations en centres médicaux pédagogiques (CMP) ont été divisées par quatre. Le rapport dénonce un "effet ciseau" entre cette augmentation vertigineuse de la consommation de médicaments et la baisse de l'offre de soin en France.

De ce fait la prise en charge n’est pas à la hauteur des enjeux

Or les pratiques psychothérapeutiques : psychanalyse, pratiques psychodynamiques et cliniques, thérapies cognitives et comportementales, thérapies familiales et groupales…sont les plus adaptées pour les troubles mentaux chez le jeune. Pour certains cas seulement, un traitement médicamenteux peut être prescrit en deuxième intention, en soutien de l’accompagnement psychologique, éducatif et social de l’enfant et de sa famille.

Non seulement la HCFEA insiste sur le non-respect des Autorisations de mise sur le marché et sur la transgression des recommandations des agences de santé et des consensus scientifiques, mais elle s'alarme sur la substitution des pratiques psychothérapeutiques, éducatives et sociales par des pratiques médicamenteuses.

Face au malaise profond qui touche une large partie de la jeunesse, il est tant de réagir.

"La santé et le bien-être mental des enfants est une préoccupation qui doit mobiliser toute la société. Tous les acteurs des champs de l’action éducative et sociale doivent y apporter une réponse", indique le HCFEA .




Abby Shelcore pour DayNewsWorld