COMPRENDRE LES ATTAQUES PRESUMEES D'ORQUES CONTRE LES VOILIERS

Récemment, des navigateurs ont témoigné avoir été attaqués par des orques.Depuis 2020, il a été recensé plus de 500 interactions initiées par les orques, principalement contre des voiliers, dans la péninsule ibérique et en particulier dans le Détroit de Gibraltar. Ces incursions ont généré une vive appréhension parmi les navigateurs, car ces créatures énigmatiques ont été observées poussant les voiliers, parfois au point de causer des dommages matériels à leurs coques. Trois navires ont ainsi été engloutis, toutefois, jusqu'à ce jour, aucune attaque physique contre des êtres humains n'a été recensée.Que se passe-t-il exactement ? Peut-on réellement parler d’attaques ? Les navigateurs ou pêcheurs sont-ils vraiment en danger ?

Des orques présentées comme des dangers de l’océan

Une famille d'orques mènerait-elle une "vendetta" en haute mer? C'est l'histoire racontée ce 27 juillet par Le Monde. Depuis bientôt trois ans, une famille de ces cétacés malmène les embarcations du détroit de Gibraltar. Le nom anglo-saxon de ces mammifères marins, "killer whale" (baleine tueuse), ajoute à leur mystère et leur danger présumé.

Plusieurs hypothèses sont avancées pour expliquer la soudaine « agressivité » présumée des animaux marins envers l'Homme. La dernière en date, exposée dans la revue Marine Mammal Science, indique que ces attaques impliqueraient neuf orques réparties en deux groupes : trois voire quatre individus juvéniles ; et un groupe d'âge mixte mené par une femelle adulte, prénommée White Gladis.

C'est elle – la seule femelle adulte impliquée dans les attaques – qui détiendrait la clé du mystère. Selon les auteurs de l'article, White Gladis chercherait à se venger après une collision avec un navire. Elle aurait développé une technique pour couler les bateaux, qu'elle aurait ensuite enseignée aux plus jeunes. Mais parmi les 39 orques identifiées dans le détroit, seules une quinzaine, "les Gladis", s'attaquent aux gouvernails.

Cette idée, bien que rappelant le célèbre film de Michael Anderson, "Orca", paru en 1977, soulève une question existentielle : « est-ce qu’on vit les derniers moments de leur incroyable indulgence ? », comme l’écrit Camille Brunel dans son livre « Éloge de la baleine » : Car en tant qu’humain, conscient du sort qu’on inflige volontairement à la Nature, on aimerait tellement que les animaux se révoltent, montrent leur colère, nous en veuillent.

Il est indéniable que les cétacés auraient de quoi être mécontents, car la liste des activités humaines qui impactent leur environnement est longue : pêcheries, pollution plastique, réchauffement climatique, trafic maritime, prospection pétrolière, explosions, sonar militaire, et même éoliennes en mer. Toutefois, il est essentiel de ne pas s'opposer aveuglément à nos activités maritimes, mais plutôt d'évaluer scientifiquement leur impact négatif, allant des simples perturbations jusqu'aux échouages.

Mais pourquoi propager un tel discours alarmiste, pourquoi nous inciter à percevoir les orques de cette façon ?

On sait que ces orques sont issues de plusieurs familles. Elles peuvent rester parfois plus de 40 minutes autour des bateaux, avec toujours le même scénario : approche rapide et intentionnelle, début d’appuis et de chocs sur la coque, avec, semble-t-il, une attirance toute particulière pour mordre et arracher le safran (partie du gouvernail d’un navire).

Un "simple jeu"?

Selon Renaud de Stephanis, docteur en sciences de l’environnement implanté dans la région il s'agirait plutôt "d'un jeu". De son analyse, cette espèce, connue pour son intelligence, ne va pas se mettre dans des situations dangereuses".

Lors de l'attaque du skipper français Sébastien Destremau, à proximité du détroit, l'océanographe François Sarano avait lui aussi étayé la thèse d'un jeu:

"Pour une orque qui fait huit mètres et cinq tonnes, jouer avec un bateau, c’est comme pour nous jouer avec un chat. Pour les humains, ça apparaît comme une agression, mais pour les orques, c’est un simple jeu", disait-il en mai.

Une chose est certaine, ces "incidents" sont pour le moins "rares et étranges", comme le souligne le biologiste Alfredo López.

Des animaux d’une étonnante intelligence

Ces orques, êtres sentients capables d'empathie, de ressentir des émotions et de la douleur, possèdent une intelligence étonnante. Elles sont capables de prendre des décisions et d'innover, en développant des compétences adaptatives dans diverses situations. Leur culture se manifeste notamment à travers des signatures sonores propres à leur clan et par une multitude de stratégies de chasse incroyables pour capturer leurs proies, comme, par exemple, s’échouer volontairement sur la plage pour attraper des otaries ou se coordonner pour créer une vague suffisante afin de déstabiliser le phoque réfugié sur un bout de banquise. Cette culture est transmise d’adultes à des juvéniles ; on parle de transmission culturelle verticale.

Les interactions entre l'homme et les cétacés remontent à la nuit des temps, tissant des liens étroits entre les deux mondes, comme en témoignent les légendes et les récits ancestraux. Bien que la plupart des 90 espèces de cétacés se tiennent discrètes ou évitent les activités humaines, certaines se rapprochent volontairement, tels les grands dauphins, les globicéphales, les baleines grises ou les baleines à bosse.Les rel

Ces situations opportunistes ne sont pas guidées pour assouvir une fonction vitale (comme obtenir de la nourriture) mais plutôt dans une volonté de nous observer. Et pourquoi pas, peut-être même de vouloir rentrer en contact avec nous...comme le suggèrent des scientifiques.




Kelly Donaldson pour DayNewsWorld