LA TECH REVOLUTIONNE NOTRE SEXUALITE

La sextech s’impose déjà comme une réalité dans notre quotidien, récompenser un jouet sexuel dans un salon historiquement dédié aux téléviseurs et aux smartphones, il fallait oser.

En janvier 2019, le salon Consumer Electronic Show de Las Vegas affole ainsi le marché de la tech en attribuant le Prix de l’Innovation robotique de l’année (catégorie robotique et drones) à Osé, un sextoy imaginé par la jeune start-up Lora DiCarlo.

En l’observant par un prisme purement technologique, Osé est bel et bien un concentré de technologie et d’innovation.

Conçu pour reproduire « toutes les sensations de la bouche humaine, de la langue et des doigts », le sextoy fait l’objet de huit brevets en attente, et constitue une « prouesse technique en biomimétisme et robotique » estime sa fondatrice Lora Haddock. La présence d’Osé dans un salon consacré aux nouvelles technologies soulève unquestionnement : les sextoys sont-ils à ce point devenus des objets technologiques comme les autres.

Quand le sexe s’inspire de la tech

Bien loin des sextoys réalistes et criards des années 2000, le design des jouets pour adultes a connu une véritable révolution ces dernières années, au point que certains appareils n’ont désormais plus grand-chose à envier au sacro-saint iPhone. Outre leur design digne d’une enceinte connectée, les sextoys intègrent désormais un véritable concentré de technologie. 

Qu’il s’agisse du biomimétisme de Lora Di Carlo, ou de la vibration basse fréquence de la marque londonienne Je Joue, rien n’est trop beau pour satisfaire ses utilisateurs et utilisatrices, et initier la révolution sexuelle de demain. 

Depuis 2014, c’est le sans-contact (stimulation du clitoris grâce à des « vagues » d’air pulsé) qui a le vent en poupe. Inventé en 2014 par l’entreprise Womanizer, le concept devient rapidement un best-seller mondial.

« C’est fou de se dire que sur la masturbation, qui est quelque chose qui existe depuis la nuit des temps, on arrive encore à innover avec ce genre de technologies qui vont révolutionner le secteur », analyse Patrick Pruvo. L’innovation appelle l’innovation. Après Womanizer, d’autres marques de jouets pour adultes s’imposent désormais sur le secteur de la « sextech ». Fondée en 2003 par des ingénieurs suédois, dont un ancien de chez Ericsson, la marque Lelo se hisse désormais parmi les marques premiums les plus populaires. Ses arguments de vente ?

Le SenSonic Wave, une technologie maison qui va permettre de « faire résonner des ondes sonores à 360° pour se propager dans le corps », nous explique Amandine Ranson, manager marketing et communications France chez Lelo. De son côté, Lora DiCarlo continue de faire figure de précurseure. 

La marque a lancé cette année Warming, une nouvelle gamme de vibromasseurs dotés d’un revêtement en nylon thermoconducteur. Capables d’atteindre une température de 40°C, ces derniers permettraient de « stimuler la microcirculation sanguine des zones érogènes, détendre les tensions musculaires externes et accroître le plaisir général », rien que ça.

La 5G et l’IA au service de l’orgasme

En plus de proposer à ses utilisateurs et utilisatrices des technologies directement pensées pour accroître leur plaisir, la sextech n’a pas échappé à la naissance de l’IoT et de l’intelligence artificielle. Un secteur encore balbutiant, estime Patrick Pruvot, mais qui commence à faire ses preuves, surtout en période de confinement où les ventes de jouets connectés explosent :

« L’idée de pouvoir commander le plaisir de son ou sa partenaire à distance, c’est quelque chose de séduisant, surtout à une époque où le sextoy est majoritairement utilisé en couple », estime le PDG de PassageduDésir.fr. (Re)connecter les gens en pleine pandémie, l’idée a de quoi être séduisante.

Avec le déploiement de la 5G, les objets connectés (et notamment ceux liés à notre sexualité) pourraient ainsi connaître des perspectives de développement sans précédent, estime Hugues Mariton, directeur des opérations digitales pour la marque Dorcel : « Cela pourrait amener une réactivité énorme sur les sextoys connectés, et plus généralement sur tout ce qui touche à l’IoT. Si la 5G tient ses promesses, il y aura un vrai gap de confort. Cela pourrait par exemple permettre de contrôler un sextoy connecté depuis n’importe où dans le monde sans aucune latence ».

Personnaliser l’expérience masturbatoire de ses clients, c’est justement le pari qu’a récemment fait le géant Dorcel. En février dernier, la marque lançait sa plateforme interactive Dorcel Podcast, conçue en partenariat avec l’agence Vokode.

Le concept ? Plonger l’internaute dans une expérience audio pornographique sur-mesure grâce à l’intelligence artificielle. Pensé comme un “assemblage de briques technologiques”, le projet intègre une reconnaissance vocale ainsi qu’un arbre décisionnel complexe destiné à faire interagir l’interlocuteur ou l’interlocutrice avec une IA conversationnelle.

La technologie, ambassadrice du « sexpositivisme » ?

En plus de pimenter notre intimité grâce à des jouets de plus en plus intelligents, la sextech s’investit aussi depuis quelques années d’une nouvelle vocation : celle de permettre à des utilisateurs et utilisatrices de se réapproprier leur propre sexualité. Qu’il s’agisse de muscler son périnée grâce à des boules de Kegel, ou de mieux vivre sa maladie, les sextoys endossent désormais le rôle « d’objets de bien-être » explique la sexologue et thérapeute de couple Céline Vendé : 

C’est là que certaines technologies de sextoys, comme les stimulateurs clitoridiens par exemple, peuvent avoir un réel aspect thérapeutique”.Au-delà même du marché des sextoys, l’apparition des nouvelles technologies permet aussi de mettre en lumière l’idée d’une sexualité positive, épanouie et surtout plurielle.

Sur YouTube et Instagram notamment, les comptes partageant l’idée d’une sexualité inclusive et bienveillante loin des clichés véhiculés par la pornographie mainstream sont de plus en plus populaires.

Les nouvelles technologies ont fait évoluer nos interactions, notamment sur le plan amoureux et sexuel. À condition de ne pas tomber dans l’excès, cela peut être très positif. Surtout en période de confinement, car les gens peuvent plus facilement se rapprocher.

Avec un champ d’application quasiment illimité, l’intelligence artificielle trouve aussi son intérêt sur le marché de la sextech. L’IA permet déjà à certains sextoys d’anticiper les séquences préférées de ses utilisateurs et utilisatrices grâce au machine learning.




Kate White pour DayNewsWorld