L'ETAT ISLAMIQUE AU KHORASSAN 

UN DANGER POUR LA RUSSIE ET L'EUROPE

Quelques jours seulement après le drame moscovite et d’un conseil de défense tenu dimanche soir pour la France rebascule dans le plan vigipirate urgence attentat. Ce lundi, le Président et le Premier ministre ont multiplié les annonces pour justifier la mesure et assurer leur détermination face à la menace djihadiste apparemment de retour en force. Deux éléments de contexte permettent de comprendre cette décision du gouvernement. L’arrivée des Jeux Olympiques fait d’abord peser une importante menace d’attentat djihadiste. Les menaces formulées contre des établissements scolaires de façon répétée depuis une semaine nous le rappellent aussi.

L’autre facteur reste évidemment l'attentat de Moscou qui révèle plus largement le regain d'activité chez Daesh au Khorassan (EI-K), que l’on pourrait aussi qualifier de Daesh en Afghanistan.

L’Etat islamique au Khorassan (EI-K)

L’EIK opère principalement dans la zone Afghanistan-Pakistan, mais est présent dans tout le « Khorassan » historique – une région qui s’étend sur des parties de l’Afghanistan et du Pakistan mais aussi de l’Iran et d’autres pays d’Asie centrale. L’État islamique du Khorasan, “EI-K” est considéré comme le “plus sanguinaire d’Afghanistan”, selon une note publiée en 2021 par l’Institut français des relations internationales (IFRI).

Créé en 2015, l’EIK vise à établir un « califat » – un système de gouvernance soumis à la plus stricte application de la charia et placé sous l’autorité de responsables religieux – dans cette région à cheval sur l’Asie du Sud et l’Asie centrale.

L’EIK partage l’idéologie de son organisation mère, le groupe État islamique, qui promeut une interprétation extrême de l’islam et considère les gouvernements laïques, ainsi que les populations civiles non musulmanes mais aussi les groupes et individus musulmans ne partageant pas sa vision de l’islam comme des cibles légitimes.

Après le retrait des États-Unis d’Afghanistan en 2021, les principaux objectifs de l’EIK ont été de remettre en cause la légitimité des talibans actuellement au pouvoir dans ce pays ravagé par la guerre, de s’affirmer comme le leader légitime de la communauté musulmane dans sa zone et d’apparaître comme le principal adversaire régional des régimes existants.

La Russie cible de l’EIK

La Russie est sa principale cible. “L’EI-K fait une fixation sur la Russie depuis deux ans, critiquant fréquemment le président Vladimir Poutine dans sa propagande”, déclare au média américain Colin P. Clarke, un analyste antiterroriste au Soufan Group, société de conseil en sécurité basée à New York. Le groupe terroriste considère que “le Kremlin a du sang musulman sur les mains” depuis les interventions russes en Afghanistan, en Tchétchénie et en Syrie.

En septembre 2022, le groupe terroriste avait revendiqué l’attentat suicide contre l’ambassade de Russie à Kaboul.

.De plus, les alliances de Moscou avec des régimes opposés au groupe État islamique, notamment la Syrie et l’Iran, ont fait de la Russie un adversaire majeur aux yeux de l’organisation terroriste et de ses affiliés. En particulier, la Russie est un allié clé du président syrien Bachar Al-Assad depuis le début de la guerre civile en Syrie en 2011, et lui fournit un soutien militaire pour lui permettre de combattre divers groupes qui cherchent à le renverser, y compris l’État islamique.

L'Europe également en ligne de mire

En frappant des cibles russes, l’EIK cherche en partie à dissuader la Russie de s’impliquer davantage au Moyen-Orient. Mais ces attentats font également une grande publicité à sa cause et visent à inspirer ses partisans dans le monde entier.

L’attaque de Moscou, qui fait suite à celle de janvier en Iran, suggère que l’EIK intensifie ses efforts pour exporter son combat idéologique directement sur les territoires de nations souveraines. Il s’agit d’une stratégie soigneusement calculée et susceptible de semer l’effroi dans de nombreuses capitales avec de « nouvelles actions projetées » de la Russie à l' Europe.

La menace de l’EI-K sur l’Europe est réelle. Des groupes djihadistes se sont recomposés en Afghanistan, certains d'ailleurs liés au califat en Syrie ou en Irak tombé en 2020, et rassemblent plusieurs tendances djihadistes qui, historiquement, ont toujours cherché à déstabiliser l'Asie centrale et l'Europe. On y retrouve notamment des groupes tadjiks qui se sont montrés très actifs ces dernières années, projetant des attentats sur le continent grâce à des réseaux proches tchétchènes ou ingouches.

Pas plus tard que mardi dernier en Allemagne, deux djihadistes afghans ont été arrêtés, soupçonnés de préparer un attentat au Parlement suédois. L’un d’eux serait membre de l’EI-K. Le groupe n’est donc pas moins dans le viseur des autorités occidentales.

Selon le spécialiste Hugo Micheron : " le djihadisme européen s'est structuré depuis 30 ans environ. [...] et si l'on veut comprendre, schématiquement, la façon dont a fonctionné le développement du djihadisme, il faut s'intéresser à un mouvement qui serait pendulaire, comme celui des marées, avec des périodes de marée basse, périodes de recomposition idéologique, et des périodes de marée haute. […]

La dernière, étant la période d'attentats entre 2014 et 2018, à peu près, quand Daech était très structuré et organisé en Syrie et en Irak, et avait des capacités logistiques pour projeter des réseaux de terroristes vers l'Europe ". 

La suivante semble arriver...




Alize Marion pour DayNewsWorld