PROCES HORS-NORME

DU BARON DE LA DROGUE MEXICAIN EL CHAPO

C’est un procès hors du commun qui s’ouvre ce lundi à New York : celui de Joachim Guzman . Extradé aux États-Unis le 19 janvier 2017, le Mexicain de 61 ans a dirigé pendant 25 ans l'un des cartels les plus puissants au monde.

Une sorte d’épilogue judiciaire pour ce grand spécialiste de l’évasion qui ont alimenté sa légende et lui ont valu une notoriété internationale,.

En 2016 a lieu la dernière arrestation de ce sexagénaire à l’ego démesuré dans une villa à Los Mochis, sur la côte pacifique, dans son fief de Sinaloa . Extradé vers les Etats-Unis le 19 janvier 2017 dans une prison de Manhattan, «El Chapo» n'est plus que l'ombre de lui-même: isolé dans sa cellule 23 heures sur 24, après deux évasions au Mexique, seuls ses avocats et ses jumelles de sept ans peuvent lui rendre visite. Même sa femme Emma Coronel, une reine de beauté de 32 ans sa cadette, est interdite de visite.

Voilà le baron de la drogue le plus puissant au monde qui lors des audiences préparatoires à son procès, ne pouvait parler qu'à ses avocats. Dans ses rares déclarations publiques, il n'a fait que se plaindre. «Je souffre tous les jours de maux de tête. Je vomis presque quotidiennement. Deux molaires qu'on ne m'a pas soignées me font beaucoup quotidiennement. Deux molaires qu'on ne m'a pas soignées me font beaucoup souffrir», écrivait-il en février dans une lettre au juge chargé de son dossier, Brian Cogan. «Je vis un calvaire 24 heures sur 24.»

Celui appelé aussi «Le Courtaud», un surnom dû à sa petite taille, environ 1,67 m, est jugé pour avoir dirigé pendant 25 ans le plus puissant cartel de drogue au monde. Les procureurs assurent aussi pouvoir démontrer qu'il a commandité au moins 37 assassinats. Ils affirment aussi avoir une montagne de preuves de sa culpabilité aux onze inculpations, quelque 300.000 pages de documents, 117.000 enregistrements audio et quantité de photos et vidéos. Beaucoup de documents restent confidentiels tout comme la liste des anciens associés, employés ou rivaux de Joaquin Guzman appelés à témoigner. Certains bénéficient de la protection du gouvernement américain, sous de nouvelles identités. D’autres sont détenus dans des prisons spéciales pour empêcher toutes représailles.

Le cartel de Sinaloa dirigé par Joaquin Guzman a expédié aux Etats-Unis plus de 154 tonnes de cocaïne ainsi que d’énormes quantités d’héroïne, de méthamphétamines et de marijuana, pour une valeur estimée à 14 milliards de dollars. A en croire les procureurs américains, « El Chapo » est le plus puissant narcotrafiquant depuis le Colombien Pablo Escobar, mort en 1993. S’il est condamné, il risque la prison à perpétuité.

La chute est rude pour celui qui dirigea 25 ans durant l'un des cartels les plus puissants de la planète, ancien héros de la culture narco et des «narcocorridos», ces ballades mexicaines qui racontent les chefs de cartels.

Né le 4 avril 1957 dans une famille pauvre d'un village des montagnes de Sinaloa, au nord-ouest du Mexique, Joaquin Guzman travaille dès l'enfance en vendant oranges, bonbons et boissons.

Comme il le raconte à l'acteur Sean Penn lors d'un entretien en octobre 2015 censé rester secret mais qui contribuera à son arrestation, il se met, adolescent, à cultiver marijuana et pavot, faute d'alternatives. «La seule façon d'avoir de l'argent, d'acheter de la nourriture, de survivre, était de faire pousser le pavot à opium, la marijuana, alors à cet âge, j'ai commencé à en cultiver et à en vendre», confiera-t-il à l'acteur américain.

Le chef du cartel de Guadalajara Miguel Angel Felix Gallardo, surnommé «le parrain» des cartels mexicains modernes le recrute. Après l'arrestation de Gallardo en 1989, Guzman fonde avec trois associés le cartel de Sinaloa, en quelques années devenant un empire aux ramifications européennes et asiatiques. «Je fournis plus d'héroïne, de méthamphétamine, cocaïne et marijuana que n'importe qui dans le monde. J'ai des flottes de sous-marins, d'avions, de camions et de bateaux», se vantait-il dans l'interview à Sean Penn, publiée dans le magazine Rolling Stone.

Sa fortune le place sur la liste du magazine Forbes des hommes les plus riches du monde, avant d'en sortir en 2013 en raison des dépenses nécessaires à sa protection.

Au moins deux de ses fils sont accusés par les autorités américaines de jouer un rôle «important» dans son cartel. Un autre fils, Edgar, a été abattu en 2008.

Robin des Bois aidant les pauvres et ridiculisant les puissants, El Chapo a aussi mené une lutte ultra-violente contre ses rivaux, une guerre entre cartels qui ravage aujourd'hui encore le Mexique.

La sélection du jury doit commencer dès ce lundi, à huis clos, une mesure réservée aux criminels les plus dangereux.

Joanne Courbet pour DayNewsWorld