COMMENT L'EUROPE VEUT-ELLE SAUVER

SON INDUSTRIE FACE A LA MENACE AMERICAINE ?

Une contre-attaque face à Washington. La Commission européenne a présenté mercredi 1er février son Green Deal Industrial Plan *(Plan industriel du pacte vert), pour soutenir l'industrie européenne , qu'elle propose aux Vingt-Sept, alors que se profile une bataille mondiale pour le leadership dans ces industries.

« Egalité de traitement » à l'international

Ce que nous voulons, c'est garantir l'égalité de traitement à l'international, a déclaré Ursula von der Leyen, alors que les Etats-Unis ont prévu 500 milliards de dollars de subventions et allégements fiscaux sur une décennie pour leurs technologies "propres".

Les propositions faites par sa présidente, Ursula von der Leyen, visent notamment à répondre à l'Inflation Reduction Act, le programme d'investissements et de subventions de 430 milliards de dollars adopté par les Etats-Unis pour aider les entreprises américaines.

Le but de l'exécutif européen est simple : éviter les délocalisations en masse et investir dans la transition énergétique.

"Nous avons une occasion unique de montrer la voie avec rapidité, ambition et détermination, de sécuriser l'avance de l'industrie de l'UE dans le secteur des technologies zéro carbone", a expliqué Ursula von der Leyen devant la presse.

Les pistes avancées par la Commission seront discutées par le Parlement européen, ainsi que par les 27 chefs d'Etat et de gouvernement de l'UE lors d'un Conseil spécial prévu à Bruxelles les 9 et 10 février. Les débats promettent d'être tendus, certains pays rejetant déjà l'idée d'assouplir les règles entourant les subventions d'Etat.

Assouplissement temporaire des règles en matière d'aides d'Etat aux entreprises

La Commission européenne souhaite introduire un « cadre temporaire de crise et de transition » 2025, pour assouplir les règles en matière d'aides d'Etat, soit les subventions accordées par les gouvernements nationaux aux entreprises.

Ce mécanisme permettra notamment de simplifier les procédures, aujourd'hui rigides, pour les projets de technologies renouvelables, mais aussi d'accorder des subventions plus élevées pour s'aligner sur des aides reçues « par des concurrents situés en dehors de l'UE », en l'occurrence aux Etats-Unis.

L'exécutif européen souhaite également permettre aux Etats membres d'accorder des avantages fiscaux à ce qu'elle nomme les "secteurs stratégiques zéro émission", une réponse directe au plan américain.

Ces propositions inquiètent certains Etats membres, aux moyens plus réduits. Ils craignent une remise en cause du fonctionnement du marché unique européen, avec des subventions massives de la France et de l'Allemagne à leurs entreprises.

"Le marché unique est la clé de notre compétitivité, et peu importe ce que nous faisons, nous devons éviter une course aux subventions", a précisé Margrethe Vestager, vice-présidente de la Commission.

Les échanges promettent d'être nourris notamment sur l'autre grand axe du Pacte vert, l'assouplissement des aides d'Etat.

La Commission opère en effet des changements en profondeur, tout en blindant son dispositif pour ne pas défavoriser les Etats les moins riches.

Utilisation des fonds existants en les orientant...

Sur la question très sensible des financements, plutôt que de lancer de nouveaux instruments, déjà sujet de controverse entre Etats membres, Bruxelles veut mobiliser les fonds existants provenant des programmes RepowerEU, InvestEU ou encore du fonds pour l'innovation. Au total, 390 milliards d'euros sont disponibles.

A plus long terme, d'autres financements seront nécessaires. C'est pourquoi Bruxelles a lancé l'idée d'un fonds de souveraineté pour financer des secteurs innovants, loin, lui aussi, de faire l'unanimité chez les Etats membres, et qui doit voir le jour d'ici à l'été.

"Le fonds de souveraineté doit préserver la cohésion et le marché unique contre les risques causés par une disponibilité inégale des aides d'Etat", a justifié Valdis Dombrowskis, le commissaire européen au Commerce.

La Commission reste floue sur les contours de ce fonds, mais explique que celui-ci pourrait être discuté lors des débats sur le budget de l'UE, prévu à l'été 2023. Certains espèrent que le mécanisme sera construit selon le modèle du plan de relance européen, qui a permis à l'UE d'emprunter de l'argent en son nom.

Une perspective qui ne réjouit pas certains pays, comme les Pays-Bas ou l'Allemagne. « Je ne suis pas certain que nous ayons besoin d'un [tel instrument] », a réagi lundi le ministre allemand des Finances, Christian Lindner, rapporte le site Politico.

"Il y a peu de chance que le sommet de février permette d'aboutir à un accord sur les financements", affirment des sources européennes, les esprits n'étant pas encore mûrs, malgré l'urgence de la situation.




Kelly Donaldson pour DayNewsWorld